La peinture de Jean Criton démarre dans les années 50 par des recherches plastiques proches de l’art informel, pour aboutir aujourd’hui à des études graphiques radicales, extraites de ce qui a fait la réputation d’une œuvre fondée sur la représentation d’architectures fictives.
Après une période fauve et post-cubiste, l’abstraction inaugure donc le parcours jusqu’à ce que réapparaissent des corps schématiques dérivés d’écritures et de structures spatiales. L’artiste pense alors que le figuratif revient comme une monstruosité issue de l’écriture et du geste où progressivement la figure anonyme et le masque seront investis dans une réflexion artistique plus engagée, sociale et politique. Les critiques classent alors ses peintures dans le mouvement de la Figuration Narrative .
L’humain disparaît dans les années 70, et l’unique sujet d’une cité, composée de constructions monumentales et sans perception de ce qui s’y passe, incarne la maîtrise absolue d’un espace euclidien qui s’oppose au chaos. Le fusain est devenu l’outil exclusif de l’artiste. En 1990, la couleur revient, monochrome. Jean Criton entame la série “Vision vue” avec des cadrages rapprochés d’une façade repérée dans une œuvre antérieure. Puis, l’œuvre se resserre encore plus sur le strict nécessaire à la révélation d’une forme par la lumière.
Aujourd'hui, d'une réflexion architecturale, il ne reste que le cube dont les arêtes colorées organisent des enchevêtrements de lignes en apesanteur, projetées dans un espace indéfini. Sur les fonds sombres et dégradés de la peinture, les couleurs tracent les trajectoires rectilignes d'un trafic aérien aux destinations inconnues.
Jacques Py, 2014